ANNÉES 70 ET 80 : BALBUTIEMENTS CRÉATIFS
Rémi Lange naît le 4 février 1969 à Gennevilliers, mais grandit en Normandie, dans un petit village nommé Le Molay-Littry. Il découvre très tôt le 7ᵉ art grâce à Émilie Cordelier, sa grand-mère maternelle, qui lui fait passer des après-midi entiers dans les salles obscures parisiennes, mais surtout grâce à Jacques Lange, son père, grand amateur de cinéma, notamment de cinéma fantastique et de science-fiction, qui réalise des films de famille en 8 mm. Rémi est profondément marqué par ces traces du passé familial qui donnent un sens à son existence, ainsi que par les films que son père lui fait découvrir à la télévision ou au cinéma — notamment Le Magicien d’Oz, Freaks, Star Wars, Chantons sous la pluie, Rencontres du 3ᵉ type, Soudain les monstres, Carrie et Elephant Man —, qu’il s’évertue à faire revivre sous forme de dessins ou de critiques.
Baigné dans un environnement artistique, entre ce père cinéphile qui filme la vie familiale, une sœur, Thérèse, qui tient un journal intime et une mère, Françoise, qui compose des poèmes, Rémi commence lui aussi à créer en consignant sa vie dans des cahiers d'écolier. En classe de 4ème, sa professeure de français, Madame Van Colen, l'encourage à explorer l'écriture de nouvelles, un genre qu'il développe avec enthousiasme. Très imaginatif, mais timide et enfermé dans son propre monde, il est souvent marginalisé au collège. Il devient un bouc émissaire comme Carrie. Il compense ce décalage par une vie intérieure riche et une passion dévorante pour le cinéma d'auteur (Claude Lelouch, Bertrand Blier, Andrzej Zulawski, Leos Carax, Jean-Jacques Beineix...), la littérature (Edgar Allan Poe, René Barjavel, Stephen King) ainsi que pour les effets spéciaux (Tom Savini)... Il se met à fabriquer des masques en latex et des cadavres dont il envoie quelques photos à la revue Mad Movies.Dans la deuxième moitié des années 1980, Rémi devient comédien dans une troupe amateur de Chartres et, en parallèle, filme sa vie avec une caméra VHS, sans avoir encore conscience de cette pratique en tant que forme artistique... Il commence même des courts métrages de fiction... qu'il ne termine jamais. Le déclencheur d'un accomplissement créatif restait encore à venir.
ANNÉES 90 : DEUX JOURNAUX FILMÉS EN SUPER 8 SORTIS EN SALLES
En 1990, sa rencontre avec Antoine Parlebas, enseignant à l’École des Beaux-Arts de Tours, marque un tournant. Grâce à lui, Rémi découvre le cinéma expérimental, l’art contemporain et s’ouvre à une réflexion artistique plus poussée. En 1991, il écrit son premier scénario de fiction, Nez-de-pied, qui remporte le 2ème prix au concours de scenarii organisé par l’Atelier de Production Centre-Val de Loire.
En 1992, il cofonde à Tours, avec Philippe Perol, le festival de cinéma LGBTQIA+ Désir…Désirs. La même année, le Festival International de la Solidarité de Dunkerque lance un concours de films sur le thème du sida. Rémi saisit cette opportunité pour réaliser, avec l'aide de son ami cinéaste Tiburce, son tout premier film de fiction tourné en Hi-8 : L’hospitalière. Mais, influencé par des artistes comme Jana Sterbak, Michel Journiac, Gina Pane, Nan Goldin, Hervé Guibert, Jonas Mekas, Joseph Morder, Tom Joslin, Peter Friedman, Lionel Soukaz, il abandonne la fiction pour se tourner vers le journal filmé. Il souhaite se démarquer des autres diaristes : plutôt qu’une simple juxtaposition monotone de fragments quotidiens, il imagine un film-journal construit comme une œuvre narrative destinée au grand public – un "film-journal-narratif-classique-grand-public", selon ses mots.
En mars 1993, il commence enfin son premier film-journal qu'il intitule Omelette (nez-de-pied), un long métrage dans lequel il fait son coming out avec une caméra Super 8 sonore. Selon Cosmopolitan, ce film est "le premier coming out en direct de l’histoire du cinéma." Le 17 mai 1994, Alain Burosse, l'un des directeurs artistiques de l'émission de Canal + L'Œil du cyclone, activiste gay, lui commande une version courte d'Omelette (nez-de-pied), intitulée Les Anges dans nos campagnes, qui sera diffusée en clair le 17 décembre 1994. Rémi reprend le procédé du journal filmé pendant l'année 1994 avec son deuxième long métrage, tourné également en Super 8 sonore, Les Yeux brouillés, axant cette fois-ci sa réflexion sur l’évolution du désir dans le couple.
En 1995, l'équipe de L'Œil du cyclone lui demande de réaliser un court métrage sur le Super 8, en Super 8 sonore, qu'il intitule Le Super 8 n'est pas mort, il bande encore ! Ce film sera diffusé en clair le 1er juin 1996. Grâce à ces deux commandes de Canal + et cette exposition médiatique inattendue, Rémi attire l’attention de plusieurs journalistes en quête de formes nouvelles. Des publications comme Libération, Le Film français, Elle s’intéressent à lui... Bernard Génin de Télérama écrit que son "culot et [son] jusqu’au-boutisme (...) touchent en plein cœur." Ses courts métrages pour L'Œil du cyclone le propulsent du cercle restreint des amateurs de cinéma expérimental et underground à celui du grand public et, surtout, lui permettent de gagner la confiance des professionnels du cinéma, dont Les Films de l'Atalante et Magouric Distribution. Résultat : ses deux journaux filmés sortent en salles en 1998 et 2000 et rencontrent un accueil critique exceptionnel. Dans Cine-Live, Xavier Leherpeur encense Les Yeux brouillés, qui est, selon lui, "un essai puissamment jouissif et intelligent sur la quintessence manipulatrice du cinéma." Dans Libération, Michel Cressole n'hésite pas à écrire, à propos d'Omelette (nez-de-pied) : "C'est du Rimbaud en Super 8." Rémi fait alors la promotion de son film sur plusieurs plateaux télé, devenant alors l'un des rares réalisateurs français à afficher publiquement son homosexualité. Devenu rapidement culte (l’un des films homos "les plus importants de la décennie 90" écrit cinedweller.com) et multidiffusé sur Canal + en 1999, Omelette (nez-de-pied) fait ensuite l’objet d’études universitaires et est fréquemment cité dans divers ouvrages consacrés au cinéma, s’imposant comme une référence incontournable du genre « journal filmé. » Il intègre également, en 2000, la collection du Musée national d’art moderne / Centre Georges-Pompidou.
ANNÉES 2000 : RETOUR À L'UNDERGROUND
Dans le cadre de sa structure, il réalise des films de fiction avec une caméra MiniDV, dans l’esprit du mouvement Dogme95. Dès le début des années 2000, il signe ses premiers longs métrages non-autobiographiques, directement édités en DVD : Tarik el hob (2003), premier film consacré aux homosexuels musulmans, devenu une référence dans de nombreux ouvrages anglophones ; et Mes Parents (2004), pastiche de film d’horreur avec Manuel Blanc, un "film-choc" selon l'écrivain marocain Abdellah Taïa.
Parallèlement, tout au long de la décennie, il répond à des commandes. Pour sa Nuit Gay, Canal + lui confie deux œuvres déjantées : L’invasion des pholades géantes (2002) et Cake au sirop de Cordom (2005), film érotique de trois minutes circulant ensuite dans de nombreux festivals, dont Pink Screens.
Trois figures du monde queer font également appel à lui pour mettre en valeur leur personnalité. Madame H, comédienne transgenre et figure comique incontournable du Point Virgule du Marais, lui propose de coréaliser The sex of Madame H (2005), moyen métrage « transforme » (Les Inrocks), « sexuel et cru » (Gus), qui sera diffusé sur Pink TV. Jann Halexander, chanteur queer, lui soumet le scénario de Statross le Magnifique (2006), court métrage sur un baron métisse, hanté par son passé, vivant isolé dans une demeure qu’il ouvre parfois à de jeunes visiteurs de passage. Enfin Hervé Chenais (sur la photo), président de l’Association Gay Lesbienne et Handicap (AGLH), lui adresse un scénario autobiographique sur sa vie d’homosexuel né avec des moignons, Devotee (2008),qui devient un moyen métrage également diffusé sur Pink TV.Toujours fidèle à sa MiniDV, Rémi poursuit dans un registre plus personnel avec Thyroid (2007), un court métrage cronenbergien inspiré du goitre de son amie réalisatrice et comédienne Sophie Blondy, (photo ci-dessous) et Partir (2009), récit d’un jeune Tunisien venu en France pour tourner dans un film, un long métrage avec Jean-Jacques Debout, Sophie Blondy, Karim Azur... Ce film est apprécié par les quelques critiques qui s'intéressent à une sortie DVD, dont 2X : "Touchant. L'acteur principal est magnifique et troublant."

En juin 2017, Rémi rencontre à Marseille un jeune artiste, Adriano Dafy, qui devient sa nouvelle muse... Naît alors la troisième partie de la "trilogie journaux filmés" ou "trilogie de l'œuf" : L’œuf dure (1h53), un faux journal filmé dont le scénario d'origine Comment faire un enfant à Françoise Létoile, commencé en 1998, avait été primé au début des années 2000 (Émergence, Fondation Beaumarchais).
En janvier 2019, Rémi termine Prouve que tu es gay,
un long métrage documentaire (1h15), produit par l'association
lyonnaise 2MSG, sur les réfugiés LGBTQIA+ en demande d'asile politique.
Ce film sera projeté sur grand écran pour la première fois à Lyon début
mars 2019 dans le cadre du festival Écrans Mixtes, puis dans celui du festival Chéries Chéris les 16 et 17 novembre 2019... À cette occasion, ce festival parle d'un "documentaire choc" et Frenchmania qualifie le film de "déchirant." Le film sera ensuite projeté dans différents cadres associatifs dont celui de La famille au grand cœur à Montpellier début novembre 2021. Faute d'avoir trouvé un distributeur cinéma, Rémi le sort en DVD et en VOD.
ANNÉES 2020 : LA TRILOGIE "MIGRANTS"
Au début des années 2020, Rémi commence une trilogie sur les migrants africains, destinée à créer un malaise, pas seulement celui dans lequel se trouve le spectateur mais surtout celui qui imprègne les intrigues. En avril 2022, il termine son neuvième long métrage Aboubakar et moi (chronique d'un confinement) tourné pendant la pandémie de Covid-19 de 2020, avec, dans le rôle principal, un jeune comédien ivoirien Aboubakar Soumahoro qui incarne un migrant vivant à la rue et dont son hôte va vouloir abuser...
En novembre 2022, ce film est projeté au MK2 Beaubourg dans le cadre du Festival Chéries Chéris qui s'extasie dans son catalogue : « c'est un "thriller sentimental" en huis clos captivant, où s’exprime un cocktail jouissif de désir, d’humour, d’authenticité et de suspense ! ». Comme les responsables de Destiny ne peuvent plus se permettre de sortir des films sans agrément, donc qui leur interdisent de toucher des subventions du CNC, Aboubakar et moi (chronique d'un confinement) ne sort qu'en DVD / VOD, chez L'Harmattan Vidéo en 2022.En 2023, Rémi réalise Le Mexique m'excite !, un moyen métrage érotique de 38 minutes, dans la veine de Cake au Sirop de Cordom. La même année, il crée 10 clips pour le chanteur Morpheus. Fin 2023, il brosse un portrait de son père Jacques Lange qui, alité, est en fin de vie. Ce court métrage de 12 minutes (terminé en 2024) s'intitule tout simplement Mon père. Ces films tournés en 2023 restent inédits à ce jour.
En avril 2024, Rémi monte une version longue (3h08) de son film Le Chanteur. À cette occasion, il tourne une nouvelle scène avec Florence Vignon, comédienne et réalisatrice, amie de Philippe Barassat, qui incarne la productrice de Thomas Polly. Cette version director's cut est achetée par la plateforme harmattantv.
⁹
Ensuite
il montre le résultat final à son ami distributeur Bruno
François-Boucher qui lui envoie alors ce texte le 17 décembre 2024 : "C'est
un film formidable. Très touchant et avec un ton unique. Il y a
beaucoup d'humour et c'est une belle manière d'aborder le deuil et de
parler des solitudes et des brisures de la vie. De plus, cette lumière
du Sud amène un contraste avec le sujet, un peu comme dans les films
italiens. Rose Portes (...) porte le film avec beaucoup
d'émotion. Les chansons apportent une
aura très joyeuse pour contrer les côtés parfois plus sombres du film
qui me fait penser à du Kusturica (...). Une vraie renaissance du cinéaste Rémi
Lange dont on sent qu'il aime les êtres humains, les traite avec respect
et fait connaître leurs différences et leurs aspects méconnus." Au mois de janvier 2025, Bruno lui propose de sortir le film avec sa société de distribution : Bon Voyage Films PR. Ensemble, ils fixent la date de sortie nationale : le mercredi 26 novembre 2025.
En août 2025, il signe un court métrage de 4 minutes intitulé Ma déclaration, un film érotique, un poème d'amour chanté par l'IA, avec Abou Doumbia, un jeune ivoirien qui a joué dans Renaître le rôle d’un homosexuel au comportement agressif...
La première projection mondiale de Renaître a lieu le 31 octobre 2025, à Bruxelles, au festival Pink Screens qui écrit dans son catalogue que c'est un film "très irrévérencieux (...), un film tendre et fauché, camp et bordeline, qui navigue entre des moments de tristesse, de plaisir, de jouissance et de bonheur (...). Déjà culte !"
Le film connaît ensuite sa première française le 15 novembre 2025 au MK2 Beaubourg dans le cadre du festival Chéries Chéris 2025. Lors de la sortie du 26 novembre 2025, Le Monde écrit : "Quelque chose comme un vieux roman-photo érotique à la gloire de la gaudriole populaire remonte de ce film pour le moins inattendu." Abus de Ciné s'enthousiasme : "Tel un petit miracle, en filmant un jeune comédien inconnu, venu tout droit du Congo, Herman Kimpo, véritable révélation du film, à l’aura et au charisme inattendus et troublants, Rémi Lange retrouve une forme de cinéma qui fonctionne (...). Le cinéaste cherche (...) la vérité nue (au premier comme au deuxième degré) de la vie, de l’amour, de la vieillesse, de l’amitié ou la confiance… et son cinéma, si personnel, s’emploie tout entier à embrasser ces thématiques sans far et dans un naturel qui rappelle certains mouvements cinématographiques comme le Dogme95." La revue de cinéma Positif souligne que "Rémi Lange réaffirme crânement son image de jusqu’au-boutiste allant là où les autres ne vont pas, quitte à les déranger, ne reculant devant aucune scène sexuelle avec nudités gênantes sur le corps fatigué de Rose. Mais comme disait Jean Cocteau à Piéral : Dérange-les, c’est ce que tu peux leur faire de mieux." Première apprécie beaucoup Renaître : "Le cinéma de Rémi Lange tutoie celui de Paul Vecchiali, fictions réalisées avec trois fois rien et beaucoup d’amour. Renaître c'est tout ça. Marseille, passions clandestines gentiment tarifiés, lieu de dragues, corps réveillés, poésie ambiante (...). La liberté d’action mérite qu’on partage cette aventure très humaine.". Le Nouvel Obs est élogieux : "Une histoire d’amour conforme au style de l’auteur d'Omelette : polysexuée, bordélique, mélancolique et terriblement attachante." La revue Jeune Cinéma encense le film : "Lange fait preuve d’inventivité et de sensibilité (...), il réaffirme encore une fois sans faillir son sens de l’humour (...). Il milite ce coup-ci pour le droit des laids et des laides d’aimer sans délai comme le chantait si bien Serge Gainsbourg, et pour la liberté sexuelle (...). Conseillé par un autre réalisateur provocateur comme lui, Philippe Barassat, il parle d’amour, de solitude et des diverses manières d’y remédier, pas toujours très « catholiques », mais très cahotiques !" Malheureusement, sûrement en raison de son sujet trop sulfureux pour une société française devenue aseptisée, le film ne suscite pas l'intérêt des exploitants de cinéma et la sortie du film est quasi inexistante...Mais Rémi continue coûte que coûte son chemin. Durant l'hiver 2025-2026, il finit de tourner Moi, Abou, menacé de mort parce que je suis gay... Parallèlement au montage de ce film, il planche sur deux projets. D’abord, une comédie populaire grinçante, Les plus grandes actrices du monde, coécrite avec Philippe Barassat, pour laquelle Arielle Dombasle a accepté d'incarner l’un des deux rôles principaux. À côté, Ma Mère, un long métrage horrifique porté par Béatrice Dalle, Michel Fau et Félix Maritaud, qui devrait être produit par Ellis Films.



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